Créer une entreprise à impact : les étapes clés pour se lancer

Créer une entreprise à impact : les étapes clés pour se lancer

Créer une entreprise à impact, ce n’est pas juste une tendance ou une démarche « feel good ». C’est, de plus en plus, une exigence du marché, des talents, et de la planète. Que ce soit pour répondre aux attentes des consommateurs responsables, attirer des investisseurs à la recherche de sens ou s’ancrer durablement sur leur territoire, les entrepreneurs qui s’engagent ont aujourd’hui une réelle longueur d’avance.

Mais concrètement, comment faire ? Par où commencer ? Quelles sont les étapes essentielles – et opérationnelles – pour bâtir une entreprise qui combine performance économique et impact positif ?

Voici une approche structurée, basée sur le terrain, pour poser les fondations solides d’un projet à impact.

Clarifier son intention : quel problème voulez-vous résoudre ?

L’impact commence par une volonté claire de changer une situation existante. Posez-vous une question simple : à quoi votre entreprise va-t-elle servir, au-delà de générer du chiffre d’affaires ?

Autrement dit, quelle externalité négative souhaitez-vous réduire (pollution, exclusion, gaspillage…) ou quelle valeur souhaitez-vous créer pour la société ou l’environnement ?

Exemple : la startup française Phenix ne s’est pas contentée de « limiter le gaspillage alimentaire » – elle s’est donné pour mission de le faire disparaître. Résultat : 180 millions de repas sauvés depuis sa création.

Clarifiez votre intention, puis formulez-la sous forme de mission d’entreprise : une phrase simple, mémorable, qui guidera toutes vos décisions.

Étudier le marché… et ses failles

Créer une entreprise à impact ne dispense pas d’effectuer une étude de marché rigoureuse. Au contraire : pour avoir de l’impact, encore faut-il qu’il y ait une demande solvable, des usages réels, et une proposition de valeur claire.

Mais là où vos concurrents analysent les opportunités économiques classiques, vous devez, vous, porter une double attention :

  • Les besoins non couverts : Quelles populations ou situations sont oubliées par les modèles traditionnels ? (Ex : mobilité rurale, vêtements adaptés aux personnes en situation de handicap, etc.).
  • Les dommages collatéraux : Quels problèmes sont créés ou aggravés par l’économie actuelle, faute d’alternatives ? (Ex : surconsommation de plastique, fast fashion, isolement des personnes âgées…)

Identifiez ces “angles morts”, confrontez-les à des données (statistiques, enquêtes terrain, entretiens) et validez que le problème que vous voulez résoudre est bien painful enough pour mériter une solution.

Définir un modèle économique soutenable

Un projet à impact qui ne tient pas la route financièrement n’ira pas bien loin. Il est fondamental de concevoir dès le départ un business model viable, en cohérence avec votre ambition d’impact.

Trois questions doivent guider votre réflexion :

  • Qui sont vos clients ? Clients finaux, financeurs publics, entreprises partenaires ? L’impact ne signifie pas toujours monétiser auprès des bénéficiaires directs (ex : un tiers-lieu financé par la collectivité plutôt que par les usagers).
  • Quel est votre canal de revenus principal ? Vente de services, abonnements, subventions, sponsoring, circuits courts ?
  • Comment faire croître votre activité sans diluer votre impact ? Si la croissance produit des effets pervers (gaspillage, exploitation, délocalisation), le modèle est à revoir.

Pensez également aux labels (ex : ESUS, B Corp, Lucie), qui peuvent renforcer votre crédibilité auprès des parties prenantes, à condition de correspondre réellement à votre mode de fonctionnement.

Prototyper, tester, itérer

Avant de déployer, testez. Ça peut paraître évident, mais trop de porteurs de projets à impact tombent dans le piège de la « mission noble = il ne peut pas y avoir d’échec ».

Un impact réel repose sur des actions concrètes, évaluées et ajustées. Vous devez donc rapidement passer par une phase de prototypage :

  • Créer une première version de votre produit ou service (MVP),
  • Le faire tester à un panel de bénéficiaires / clients cibles,
  • Recueillir des retours honnêtes,
  • Ajuster en continu jusqu’à obtenir une solution réellement efficace.

Cas concret : la coopérative Mobicoop, alternative solidaire à BlaBlaCar, a longtemps expérimenté différents modèles de gouvernance et types de trajets avant de stabiliser son offre. Cela leur a permis de rester alignés avec leur mission tout en assurant leur pertinence sur le terrain.

Construire une équipe alignée et engagée

Une entreprise à impact repose sur les personnes qui la portent. Et la cohérence entre discours et pratiques commence à l’intérieur.

Recruter dans une logique d’alignement de valeurs, c’est essentiel. Mais cela ne suffit pas. Il faut aussi mettre en place une culture de gestion participative, équitable et inclusive. Cela passe par :

  • Une transparence sur les décisions clés,
  • Des outils d’intelligence collective,
  • Un pilotage de l’impact intégré aux indicateurs de performance.

Astuce utile : rédigez une « charte d’impact » interne qui formalise vos engagements, vos seuils de vigilance, vos critères d’arbitrage. Cet outil sera précieux pour rester cohérent en période de croissance – ou de tension.

Mesurer l’impact de façon rigoureuse

Le mot “impact” ne doit pas rester un argument marketing. Ce qui ne se mesure pas ne peut ni se piloter, ni s’améliorer. Il est donc clé d’identifier des indicateurs pertinents dès la conception du projet.

Trois règles simples :

  • Mesurez ce qui compte vraiment : Nombre de tonnes de CO₂ évitées, nombre de bénéficiaires sortis d’une situation de précarité, litres d’eau économisés… Focalisez-vous sur quelques indicateurs significatifs.
  • Collectez des données vérifiables : Précisez la méthode de calcul, utilisez si possible des labels ou référentiels existants (SDGs, Impact Score, ACT pas-à-pas, etc.).
  • Communiquez en toute transparence : Y compris sur les difficultés et les apprentissages. Cela vous crédibilise auprès de vos partenaires… et inspire les autres.

Quelques outils gratuits ou peu coûteux pour démarrer : Impact Gap Canvas, Social Business Model Canvas, South Pole, Bilan Carbone, AirTable pour organiser vos remontées de terrain.

Financer son projet avec stratégie

Bonne nouvelle : les financeurs sont de plus en plus nombreux à chercher des projets à impact. Mais il faut adapter votre approche et votre discours.

Si vous vous adressez à des investisseurs privés, démontrez que votre impact est un levier économique durable – et non une ligne de coût.

Côté financement public ou à mission (fonds à impact, fondations, mécénat), ciblez les guichets spécifiques et construisez des dossiers solides, avec des indicateurs concrets et des preuves d’engagement (partenariats, expérimentations réussies, gouvernance partagée…)

Ne négligez pas non plus :

  • Les campagnes de crowdfunding pour tester l’adhésion du public,
  • Les réseaux d’accompagnement spécialisés (makesense, Ronalpia, Les Canaux…),
  • Les incubateurs dédiés aux projets à impact qui peuvent faciliter vos premiers financements (INCO, La Ruche, Antropia ESSEC…)

Faire évoluer son impact avec son entreprise

L’impact n’est jamais figé. Une innovation en entraîne une autre, une nouvelle échelle exige de nouveaux garde-fous. Et parfois, les premières intentions doivent être réajustées.

Ce qui compte, c’est votre capacité à questionner régulièrement votre modèle, à écouter les retours du terrain, à corriger les effets contre-productifs éventuels.

Une entreprise à impact ne se résume pas à une image ou un statut juridique. C’est un processus vivant, exigeant, mais particulièrement porteur de sens et de différenciation dans un contexte économique en mutation.

Et si vous hésitez encore, rappelez-vous : selon une étude BPI / Harris Interactive, 83 % des Français estiment que les entreprises doivent aujourd’hui jouer un rôle actif dans la transition écologique et sociale. Et 48 % des jeunes diplômés choisissent désormais leur employeur en fonction de son impact positif. L’impact n’est plus une option. C’est un avantage compétitif stratégique.

Alors, prêt à passer à l’action ?